Délégation des actes vétérinaires aux ASV : quels changements concrets pour les cliniques ?

Une réponse à une tension bien connue

Depuis plusieurs années, le manque de vétérinaires engendre une surcharge de travail, des délais d’attente allongés et une pression accrue sur les équipes soignantes. De nombreux actes techniques sont déjà réalisés par les ASV dans la pratique quotidienne, parfois dans un flou juridique encore non tranché par la réglementation actuelle. La LOA vient répondre à cette réalité de terrain, en officialisant ce qui se pratique officieusement, et en créant un cadre sécurisé pour tous les acteurs de la profession. Cette réforme vise à alléger la charge des vétérinaires tout en valorisant les compétences des auxiliaires.

Une délégation strictement encadrée

La loi précise que seuls les ASV ayant suivi une formation spécifique et certifiante pourront pratiquer certains actes techniques. Ces derniers devront toujours être réalisés sous la responsabilité d’un vétérinaire présent sur site. Un décret ministériel viendra officialiser la liste exacte des actes concernés. Si elle n’est pas encore publiée, les organisations professionnelles vétérinaires évoquent déjà un certain nombre de gestes : administration d’injections (hors vaccins, stupéfiants et médicaments à usage vétérinaire exclusif), pose de cathéters intraveineux, prélèvements sanguins ou cutanés, surveillance du monitoring anesthésique, soins postopératoires simples (pansements, retrait de points), voire assistance aux soins intensifs. Il ne s’agit pas de déléguer des diagnostics ni des actes chirurgicaux complexes, mais bien d’optimiser les compétences présentes dans l’équipe pour fluidifier l’organisation des soins, tout en respectant la sécurité des patients.

Une mise en œuvre progressive mais structurante

Avant une application concrète en clinique, plusieurs étapes restent à franchir : la publication des décrets d’application, la définition officielle de la liste des actes, l’élaboration des référentiels de formation, la mise en place des certifications et la création d’un registre national des ASV habilités. Ce processus, bien que lancé, pourrait encore s’étaler jusqu’en 2026. Pour autant, la réforme impose déjà une réflexion structurelle. Car cette délégation, en plus de son impact organisationnel, pourrait jouer un rôle clé dans l’attractivité et la fidélisation des ASV, en leur ouvrant des perspectives d’évolution professionnelle concrètes.

Ce que peuvent faire les cliniques dès maintenant

Même en l’absence de texte d’application, les cliniques vétérinaires peuvent d’ores et déjà amorcer le changement, de manière proactive :

  • Informer les ASV sur la réforme en cours, afin de susciter intérêt, motivation ou questionnements. Une réunion d’équipe dédiée peut permettre de répondre aux premières interrogations.
  • Recueillir les intentions et souhaits : toutes les ASV ne souhaiteront pas nécessairement s’engager dans ce parcours. Certaines pourront craindre une surcharge ou un glissement de tâches. D’autres, au contraire, se sentiront valorisées par cette perspective d’évolution. Un questionnaire anonyme peut faciliter une expression libre.
  • Identifier les besoins en formation : quelles compétences sont déjà acquises ? Lesquelles nécessitent un renforcement ? Cette analyse permettra d’anticiper les demandes futures et d’optimiser les parcours dès qu’ils seront proposés.
  • Réfléchir à l’organisation future : quelles tâches pourront être déléguées, dans quel cadre, et à quelles conditions ? Une cartographie des actes pratiqués et des temps vétérinaires/ASV peut servir de base à cette réflexion.

Une évolution nécessaire, à intégrer dès maintenant

Cette délégation ne signe pas une simple redistribution des tâches : elle impose une révision plus large de l’organisation du travail, de la gestion des compétences et du management des équipes. Elle implique également une vision stratégique sur la montée en compétence et la fidélisation du personnel.

Les structures vétérinaires qui initient cette transition dès maintenant gagneront en fluidité, en engagement des équipes et en efficacité dans la prise en charge des patients. Mieux préparées, elles seront aussi plus agiles pour mettre en œuvre rapidement les dispositifs une fois les décrets publiés.

En attendant, toutes les structures vétérinaires doivent se préparer à intégrer ces changements, qui redéfiniront le travail en clinique dans les années à venir.

Stéphanie EVRARD, ASV

📚 Sources

GP-FR-NON-250700010