Le droit à la déconnexion, un besoin essentiel à respecter

Le droit à la déconnexion, un besoin essentiel à respecter

Qui n’a jamais poussé un soupir de lassitude en découvrant, un dimanche, un message sur WhatsApp annonçant l’hospitalisation de Kiki, dont il faudra s’occuper dès votre retour lundi ?

Dans un contexte où la communication interne s’appuie sur une multitude d’outils numériques, la question de l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle devient cruciale. Comment naviguer entre la nécessité d’une collaboration efficace au sein de l’équipe et le droit à des moments de repos, à l’abri des intrusions professionnelles dans notre espace privé ?

Pourquoi bénéficier du droit à la déconnexion ?

Dans l’ère actuelle dominée par les réseaux sociaux et les outils numériques, les professionnels, notamment dans le secteur vétérinaire, sont souvent confrontés à une « connexion permanente ». L’utilisation de plateformes comme WhatsApp ou Slack, créées pour communiquer au sein de l’équipe, peut conduire à des interruptions intrusives au-delà des heures de travail, affectant le repos et les congés.

Par conséquent, la démarcation entre sphère professionnelle et espace personnel peut se réduire, surtout dans des métiers exigeants comme ceux des auxiliaires vétérinaires ou des vétérinaires. L’équilibre entre ces deux aspects de la vie se révèle précaire, miné par des horaires extensibles et une charge de stress et de responsabilités parfois considérable.

Face à cette réalité, le droit à la déconnexion s’impose comme un principe vital, essentiel à la préservation de la santé mentale et au bien-être des équipes soignantes vétérinaires. En effet, nous sommes régulièrement confrontés à des situations d’urgence, à la fin de vie, à l’euthanasie, ou encore aux attentes et émotions des propriétaires d’animaux. Cette pression peut mener à l’épuisement professionnel, affectant tant la santé mentale du praticien que le niveau des soins dispensés. Ce droit est donc crucial, offrant des instants de récupération nécessaires au maintien d’un équilibre mental et d’un engagement professionnel épanoui, et ce, sur la durée.

Cette notion de repos et de déconnexion est jugée si importante qu’elle a fait d’ailleurs l’objet de discussions au-delà des frontières nationales. Les députés européens se sont ainsi penchés sur la question en 2021. Ils ont invité la Commission Européenne à rédiger une législation applicable à tous les États membres, garantissant aux salariés le droit de se déconnecter après leurs heures de travail sans craindre de conséquences négatives. Il en ressort une réelle volonté de protéger le bien-être des travailleurs à l’ère numérique.

Et en France, qu’en est-il de la législation pour ce fameux droit à la déconnexion ?

La déconnexion est un droit

Depuis 2016, l’article L2242-17 du Code du travail garantit le droit à la déconnexion des salariés pour protéger leur repos et équilibrer vie professionnelle et personnelle, interdisant l’obligation d’usage des outils numériques hors travail.

L’application de ce droit, relevant de la santé et sécurité au travail, nécessite même un accord collectif ou une charte après consultation du CSE dans les entreprises de plus de 11 salariés. Les employeurs doivent discuter de ce droit durant les négociations annuelles, sous peine de sanctions, bien que l’absence de charte spécifique n’entraîne pas de pénalité directe.

Cependant, le non-respect des temps de repos peut conduire à des sanctions civiles et pénales. Dans le secteur vétérinaire, certains employeurs ont été confrontés à des actions en justice pour avoir maintenu des communications professionnelles intrusives en dehors des heures de travail.

Bien que le cadre légal du droit à la déconnexion soit établi, la législation du travail ne prescrit pas de mesures concrètes pour sa mise en application. Il incombe donc aux employeurs d’initier les démarches nécessaires pour garantir le respect de ce droit fondamental.

Comment le mettre en place au sein de votre établissement vétérinaire ?

  • Définir des politiques internes : élaborer des politiques internes écrites qui doivent préciser les attentes relatives à la communication au sein de l’équipe et instaurer des normes pour l’utilisation des outils numériques ;
  • Sensibiliser les employés : mettre en place des programmes d’information visant à souligner l’importance du respect des périodes de repos. La structure doit s’axer sur le bien-être de toute l’équipe soignante, vétérinaire comme ASV.
  • Bien utiliser les outils numériques : l’adoption de solutions technologiques adaptées peut également faciliter le respect du droit à la déconnexion. Des plateformes de communication telles que Slack offrent la possibilité de limiter l’envoi et la réception de messages en dehors des plages horaires définies.

Ces mesures, initiées par l’employeur, jouent un rôle crucial dans la mise en œuvre effective du droit à la déconnexion, contribuant à protéger les temps de repos des membres de l’équipe.

Conclusion

Dans le paysage législatif actuel, le droit à la déconnexion semble être une prérogative bien établie pour les salariés. Cependant, lorsqu’il s’agit de le transposer au monde des vétérinaires libéraux tels que les associés, le brouillard réglementaire s’épaissit.

À ce jour, aucun cadre légal spécifique ne vient encadrer leur droit au repos et à la récupération. Cette lacune législative est d’autant plus préoccupante que les employeurs, surchargés par des responsabilités supplémentaires, auraient tout autant besoin de cette déconnexion pour préserver leur bien-être ainsi que leur efficacité professionnelle et managériale.

Audrey QUENET, ASV

GP-FR-NON-240300038